17e semaine de guerre - Lundi 23 novembre au dimanche 29 novembre 1914
LUNDI 23 NOVEMBRE 1914 - SAINT CLEMENT - 113e jour de la guerre
MARDI 24 NOVEMBRE 1914 - SAINT JEAN DE LA CROIX - 114e jour de la guerre
MERCREDI 25 NOVEMBRE 1914 - SAINTE CATHERINE - 115e jour de la guerre
JEUDI 26 NOVEMBRE 1914 - SAINT JOSAPHAT - 116e jour de la guerre
VENDREDI 27 NOVEMBRE 1914 - SAINT VIRGILE - 117e jour de la guerre
SAMEDI 28 NOVEMBRE 1914 - SAINT GREGOIRE III - 118e jour de la guerre
DIMANCHE 29 NOVEMBRE 1914 - 1ER DIMANCHE DE L’AVENT - 119e jour de la guerre
Revue de presse
- Ypres est violemment bombardée
- 300,000 citoyens des Etats-Unis veulent venir combattre contre l'Allemagne
- Les Russes progressent rapidement vers Erzeroum
- Ils bombardent aussi Soissons et Reims
- Violentes attaques dans l'Argonne
- Les forts de Cracovie bombardés par l'artillerie russe
- Occupation de Bassorah par les troupes britanniques
- Les succès russes s'accentuent
- Dans le Nord la canonnade diminue - Ils bombardent Arras
- La débâcle allemande en Pologne
- La fuite du Kronprinz
- Reims de nouveau bombardé
- Le président de la République remet la médaille militaire au général Joffre
- La bataille de Lodz - Situation très critique des forces allemandes
Morceaux choisis de la correspondance
23 novembre - Paul Cuny (Versailles) à GC, son frère.- Je communique à peu près bien avec tout le monde maintenant même pour affaires. Nous livrons des filés pour la Vologne, en Russie nous marchons en double équipe avec 47 000 broches et 840 métiers. Nous faisons des tissus pour l’armée mais le coton est rare et très cher (le coton d’Amérique ne peut venir que par Vladivostok et encore), à Schlestadt nous marchons aussi un peu.
Grâce au radium on espère pouvoir la prolonger durant la guerre, qu’elle revoie ses fils qui ne peuvent bouger de leur poste.
24 novembre - ELLE.- Je suis rentrée à trois heures. Mon voyage de retour s’est bien mieux effectué que l’aller. A l’aller, notre compartiment était envahi par des bonnes gens de 3ème classe et, étant huit, pas moyen de s’étendre et de dormir d’une façon reposante. Tandis que cette fois, de Paris à Chaumont soit douze heures, j’étais seule avec un capitaine d’infanterie, homme extraordinairement bavard, brave garçon (il a absolument voulu que je partage son dîner, voyant que je n’avais que du lait) mais peu intéressant. De Chaumont à Epinal j’ai eu comme compagnon le beau-frère de Mr Flayelle, gros et grand homme de 50 ans passés, également très aimable quand il ne ronflait pas d’une façon trop sonore. Enfin j’avais une banquette pour moi seule et me suis bien reposée malgré les arrêts et changements de trains trop fréquents. Ce monsieur venait de Normandie, où il semble être gros propriétaire, pour voir son neveu Flayelle blessé et soigné à Nancy.
J’ai retrouvé notre trio avec joie, tu le devines, Maman ne m’attendant pas était partie à Epinal. Il paraît que Pierre Mangin est venu me voir à deux heures, mais je n’étais pas encore là et Maman étant partie il n’a vu que les enfants. Il était en uniforme vert avec deux galons d’argent m’a dit Dédé. Tu sais qu’il a trouvé la petite place rêvée près de son neveu à Epinal. Il aurait certes mieux fait de rester à Cornimont où il aurait été plus utile.
J’ai bien vite écrit à Mère en rentrant pour sa fête. Je n’y avais pas du tout songé au cours de mon voyage, et voilà aussi ton anniversaire que j’ai laissé passer sans te redire tout mon amour, mon mari si cher, toute la tendresse dont je voudrais t’entourer. Soigne-toi bien, ne fais pas d’imprudence.
Hier matin, j’ai bien vite fait un petit colis enveloppé de toile cirée dont tu pourras te resservir soit comme emballage, soit comme plastron contre les intempéries et contenant une petite partie de ce que je t’avais apporté. Je t’ai mis des feuilles pour y griffonner des chiffres si tu en as le loisir.
Marie Molard m’écrit que Mère ne va pas bien, que c’est donc pénible. Je ne lui ai naturellement pas parlé de ta blessure. Inutile de la mettre encore en soucis. Tout ce qu’espère Marie, c’est que grâce au radium on puisse la prolonger durant la guerre, qu’elle revoie ses fils qui ne peuvent bouger de leur poste.
Tu es guéri et Georges est vivant quoique prisonnier. Il nous parle des bons soins qu’on lui prodigue dans son hôpital de Schwerin dans le Mecklembourg, Maman en viendrait presque à remercier les Allemands de prendre ainsi soin de lui.
26 novembre - ELLE.- Georges Boucher est vivant ! Il est retrouvé et il est vivant ! Nous l’avons enfin reçue cette lettre tant espérée. Maman se sent toute délivrée de son cruel souci. Quelles inquiétudes il nous a données. Il a dû souffrir bien durement alors que tout seul il a reçu les derniers sacrements et s’est vu condamné, ce sont des heures qui doivent compter dans une vie plus que toutes les minutes heureuses. Il nous parle des bons soins qu’on lui prodigue dans son hôpital de Schwerin dans le Mecklembourg, Maman en viendrait presque à remercier les Allemands de prendre ainsi soin de lui. Nous espérons apprendre bientôt sa complète guérison. Avec son habileté ordinaire à s’arranger de tout et à se faire bien voir partout où il passe, il ne se plaint de rien et semble passer le temps aussi philosophiquement que possible dans son hôpital à apprendre l’allemand aux officiers d’infanterie français et anglais avec lesquels il vit. Le voilà maintenant en sûreté et certain de nous revenir.
Camille a dit à Cécile que Georges avait été cité 2 fois à l’ordre du jour du corps d’armée et de l’armée et qu’il était proposé pour la médaille militaire, proposition appuyée par son général.
Monsieur Knipiler consent maintenant à se remettre au travail. Il a retrouvé son courage en apprenant que son fils était vivant, prisonnier à Ingolstadt. Ils ont été si malheureux durant 2 mois croyant leur fils mort. Madame a fait le tour des champs de bataille, regardant toutes les tombes et essayant de chercher les inscriptions pensant y trouver le nom de son malheureux fils et, au début de novembre, le pauvre garçon a enfin pu donner signe de vie.
28 novembre - ELLE.- Te voilà à Meudon, séjour à Val Fleury et je pars demain te rejoindre.
Oncle Vautrin nous écrit la mort de sa pauvre Mère. C’est terrible de penser à ce qu’elle a subi pour terminer sa vie.
Camille habite des tranchées en Belgique (il est décoré, c’est paru dans l’Echo de Paris).
Les 5 petits vont très bien. Qu’ils continuent les pauvres chéris, car, comme dit Maguy, on a bien assez de soucis avec les grands.
Gravures du Petit Journal - Supplément illustré - 29/11/1914 (N° 1249)
En Alsace - Nos instituteurs soldats font la classe en français aux petits Alsaciens
Vous vous rappelez l’émouvant récit d’Alphonse Daudet : ‘La dernière classe’, que, naguère, nos maîtres nous lisaient, au collège. C’est dans une école d’Alsace, en 1871. L’instituteur annonce aux écoliers : « Mes enfants, c’est la dernière fois que je vous fais la classe. L’ordre est venu de Berlin de ne plus enseigner que l’allemand dans les écoles de l’Alsace et de la Lorraine. Le nouveau maître arrive demain. Aujourd’hui c’est votre dernière leçon de français… ». Et le vieux maître termine sa leçon en pleurant, après avoir écrit au tableau noir : « Vive la France ! » Pauvre vieux maître, pourquoi n’est-il pas là pour voir la France rentrer triomphalement dans les écoles d’Alsace.
Un de mes confrères a assisté à la première leçon faite par un de nos instituteurs, en costume militaire, dans une de ces écoles : « Dans la ‘Schul und Gemeinhaus’ (maison d’école et mairie) dit-il, les petits Alsaciens, en leurs beaux habits du dimanche, venaient de se réunir. Ils s’installèrent aux pupitres. Quelques parents restaient debout dans le fond de la salle. Un brouhaha fait de surprise et d’impatience accueillit le professeur. Où est-il ce vieux magister allemand, à barbe rousse et à lunettes, rogue, pédant, la schlague en main, image caricaturale de la ‘kultur’ germanique, dont Hansi s’est fait l’historiographe cruel ! C’était un sous-officier, un sous-officier en tenue qui grimpait dans la haute chaire. Clair visage rayonnant, trapu, décidé, blond, les prunelles bleues : un vrai fils d’Alsace, pardieu ! Il s’adressa en patois à ses élèves et aux parents : tous éclatèrent de rire. Et cette première leçon n’eut qu’un thème, une phrase d’abord parlée, qu’à tour de rôle sur le tableau noir, puis sur les cahiers, les enfants inscrivaient : « La France est notre patrie. Vive la France ! »
L’artilleur héroïque
C’est un glorieux incident de la campagne entre la Marne et l’Aisne. A V… les Allemands avaient de l’artillerie et des forces d’infanterie supérieures. Les troupes françaises, en nombre très inférieur et avec des canons de moindre portée, furent contraintes de se retirer. Pourtant un canon français resta en action. Ce canon était servi, raconte un témoin oculaire, par un canonnier qui avait juré de n’abandonner son poste qu’après avoir épuisé toutes ses munitions. Il ne cessa d’envoyer des obus sur les Allemands dont la colonne avançait d’une façon continue, mais bien que son tir leur causât des pertes très grosses, il lui fut impossible de les arrêter. Peu à peu l’ennemi se rapprocha. Le canonnier français avait encore douze obus quand les Allemands étaient à trois cents mètres ; quand son dernier obus eut été tiré, l’ennemi n’était plus qu’à cent mètres. Alors avec beaucoup de sang-froid, il enleva la culasse de sa pièce et réussit à s’échapper sans autre blessure qu’une balle dans le côté. Des témoins dignes de foi disent que ce canonnier a tué à lui seul plusieurs centaines d’hommes à l’ennemi.
Thèmes qui pourraient être développés
- Généraux - Médaille militaire au général Joffre
- Pologne - Les forts de Cracovie bombardés par l'artillerie russe
- Aviation - Les zeppelins
- La prise de Bassorah
- Disparus - Les mères qui cherchent les noms sur les tombes pour trouver un disparu
- La fidélité de l'Alsace (LPJ Sup)
- Nos instituteurs soldats font la classe en français aux petits Alsaciens (LPJ Sup)
- Le canal de Suez et les Turcs
- Conseils pratiques - Sac de couchage, poncho, cannes pour les blessés (LPJ Sup)
- Religion - Fête religieuse - L’Avent
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